L’Association Marocaine des Agences Immobilières (AMAI) met fin à l’anarchie de l’intermédiation immobilière au Maroc en déposant une proposition de loi qui pourrait changer la donne.
Les « semsars » peuvent continuer à travailler librement et sans contrainte tant que le nouveau gouvernement n’a pas pris place. Dès l’entrée en fonction de celui-ci, le projet de loi réglementant la profession des agents immobiliers sera transmis au Secrétariat Général du Gouvernement (SGG) pour être discuté avant son adoption. Face à un marché pollué par l’informel, l’Association Marocaine des Agences Immobilières (AMAI) aura passé deux ans à concocter ce cadre d’intermédiation immobilière. Le but étant de mettre fin à l’anarchie qui règne dans ce secteur qui n’a jamais été réglementé auparavant. Au menu, conditions d’accès au métier d’agent immobilier et modalités d’exercice de cette même profession.
Ainsi, la commission juridique du ministère de l’habitat et de la politique de la ville a reçu exactement 85 articles, faisant l’objet d’une proposition de loi. Plusieurs articles jugés « restrictifs », ont été modifiés ou supprimés. Pas plus de 37 seront retenus. Ils concernent entre autres l’accès à la profession, à savoir l’attestation d’une formation BAC+2 au minimum, en plus d’un stage ou une expérience professionnelle d’un an. La raison est simple pour Mohamed Lahlou, à la tête de l’AMAI, « nous avons affaire aujourd’hui à des partenaires, des investisseurs étrangers et des clients très avancés dans leur domaine. Il est donc évident que les agents immobiliers traitant des affaires avec ces parties, doivent s’adapter et être au niveau requis ».
Quant aux chefs d’agences qui n’ont pas de diplôme, ils devront justifier d’une expérience équivalente à 10 ans pour pouvoir continuer à exercer. La liste des articles de réglementation continue avec les modalités d’exercice. Dorénavant, il faudra aussi avoir un local professionnel pour se déclarer agent immobilier. Ces conditions permettront à l’agent d’obtenir sa carte professionnelle auprès du ministère et de travailler dans les règles de l’art.
Tout le monde est gagnant
Toutes les parties sont gagnantes du moment que :
– L’Etat récupère ses impôts et suit toutes sortes de transactions immobilières de très près. Comme l’explique le président du groupement professionnel, « les semsars qui travaillent dans le noir ne paient pas d’impôts, ni de factures, ni les frais de la patente. La situation est devenue ingérable à tel point que certaines agences immobilières ont été contraintes de mettre la clé sous la porte à cause de l’informel qui gagne du terrain », explique-t-il. Par ailleurs, Mohamed Lahlou s’alarme sur l’hébergement involontaire des terroristes à cause de « la location aveugle ». Autrement dit, en régularisant le marché, l’Etat pourra avoir une certaine traçabilité qui permettrait d’éviter ce genre de situations.
– Les semsars seraient inclus dans le circuit de vente, de location et d’achat sous le titre de « rapporteurs d’affaires ». Comme proposé par l’AMAI, l’agent informel pourra signer un contrat exclusif, de gré à gré avec l’agence qui lui fournira une carte professionnelle et une rémunération ou une commission sur les affaires qu’il rapportera à l’agence. Cependant, ses missions ne lui confèreront en aucun cas le droit de régler les questions notariales ou de gérer la transaction. De surcroît, ce dernier pourra continuer de travailler légalement en déclarant ses revenus bien évidemment.
– Les clients ont une visibilité sur le processus d’acquisition ou de location du bien immobilier. Qui plus est, l’agence est garante de la sécurité de la transaction.
Un plan de sensibilisation bien défini
Parmi les propositions de l’AMAI qui compte une centaine d’agences adhérentes, l’importance de la garantie financière et de la responsabilité civile et professionnelle. La première étant nécessaire pour les agences immobilières qui ont recourt au crédit bancaire, la deuxième servirait à couvrir ces dernières en cas de faute professionnelle. « Malheureusement, les compagnies d’assurance qu’on a approchées ne sont pas encore prêtes à nous prêter main forte parce qu’elles ne savent pas quoi assurer exactement », déplore Mohamed Lahlou en faisant référence au cadre juridique inexistant.
D’un autre côté, l’AMAI tient son Assemblée Générale Ordinaire le 31 mars 2017. Après l’élection du nouveau bureau exécutif, Mohamed Lahlou compte déployer une campagne de communication acharnée pour sensibiliser sur la dangerosité de l’informel dans le secteur de l’immobilier. « Les acquéreurs doivent être conscients de l’importance de s’adresser à une agence immobilière, l’unique acteur à même de les protéger et de verrouiller les transactions conformément à la loi », assure-t-il. Un message qui s’adressera au plus grand nombre à travers la presse et les canaux audiovisuels.
Enfin, les professionnels des agences immobilières réfléchissent sérieusement à se regrouper en conseil d’ordre. Mais avant cela, il sera question de créer des délégations en premier lieu. Une pour la région sud à partir de l’axe Marrakech-Agadir, une deuxième pour le centre à Rabat et une autre pour le nord, à savoir la ville de Tanger et régions. « De cette façon, on pourra avoir plus d’adhérents, donc plus nombreux à défendre notre projet de loi en face de la commission parlementaire. Nous voulions aussi instaurer une délégation pour l’axe Fès-Meknès et régions, mais les professionnels de ces deux villes sont encore très attachés à une culture ancestrale, ils ne se sont pas encore adaptés à l’ère du temps ».
Chaima Ezzahraoui pour Property Finder Morocco
(Sarouty.ma)